J’écoute Lancelot me répondre à propos de la sécurité à Poudlard, avec tant de ferveur que ça m’en coupe presque le souffle. Il vient de se saisir de mon visage, en l’attrapant à deux mains pour m’obliger à soutenir son regard. Je sens ses doigts qui caressent imperceptiblement ma peau sans pour autant me relâcher, et c’est ce cocktail au complet qui réussit à me rassurer efficacement. On peut bien lui reprocher ce qu’on voudra, Lancelot Avery sait avoir les mots qu’il faut, tout du moins avec moi. C’est ça aussi chez lui qui m’a plu bien avant que je ne me décide à jeter mon dévolu sur sa personne, malgré tout ce qui semblait nous séparer. Je fais un effort pour relâcher les muscles de mon cou et me laisse porter par ses mains robustes. Je lui souris, prend le temps de soupeser ses paroles, de réfléchir à la meilleure réponse que je pourrais lui offrir… Puis, malgré moi, je me rappelle les mots qu’il vient d’avoir à propos de son appartement et du tour qu’il doit y faire avec Meredith pour vérifier l’état général des lieux… ça me rappelle qu’effectivement je les avais trouvés très proches, déjà du temps du bal. Il m’avait semblé les voir passer une bonne partie de la soirée à discuter ensemble, ce qui s’explique sans doute par les atomes crochus qu’ils semblent partager. Il y a leur appartenance aux serpentards évidemment, mais aussi leurs âges pas si éloignés – toujours moins que la différence que je partage moi-même avec Lancelot – et même s’ils ne faisaient pas parti du même cursus, le courant avait toujours semblé être au beau fixe entre eux, peu importe les années qui passaient… là encore quelque chose dont je ne pouvais moi-même pas franchement me vanter. Je fis la moue et me rembrunit en sentant une pointe d’amertume, de jalousie même, remonter en moi depuis le fond de mon estomac jusqu’à m’étreindre les poumons. J’ai toujours été comme ça, trop impulsif, surtout avec Lancelot. Mais au fond je ne devrais pas avoir à en rougir : ne sommes-nous pas ensemble aujourd’hui grâce à ça ? J’ai une pensée pour l’époque où j’avais eu le cran, complètement ivre, de le prendre en filature après une soirée aux trois balais, pour pouvoir lui foutre ma plus belle droite de tous les temps.
« —
Sache que je ne laisserais personne te faire du mal Hiroshi. D’accord ? Je ne me le pardonnerais pas si il t’arrivait quelques choses. »
J’ai un frisson d’excitation et d’appréhension mêlées, parce que ses mots ont su taper là où ça fait toujours mouche chez moi. Mes doigts partent se saisir des siens pour l’obliger à relâcher sa prise, puis je me penche un peu en arrière en levant le nez pour observer les gros nuages gris qui alourdissent le ciel et nous cache le soleil par moment… Ouais, il y a quelque chose de nostalgique dans
notre histoire – celle que je partage avec Lancelot depuis plusieurs années – et qui a le dont de me faire réagir comme une collégienne moldue. Lorsque je baisse à nouveau les yeux vers lui, c’est pour lui décocher mon plus beau sourire avant de récupérer ses mains pour les serrer dans les miennes.
« —
Je sais. »
Je souffle en rapprochant mon visage pour venir déposer mes lèvres contre les siennes. Son contact est chaud, contre ma peau. Il y a du vrai lorsqu’il dit que je suis une petite nature, que «
monsieur le frileux veut être au chaud ». Je ne peux pas m’empêcher de sourire contre ses lèvres tandis que je passe à nouveau mes bras autour de son cou.
« —
Merci. »
Moi qui étais décidé à bouger d’ici, je crois bien que l’envie m’est complètement passée.
« —
Je crois que je t’aime plus que de raison… »
Je murmure au creux de son oreilles avant de déposer ma joue contre son épaule.
« —
Dis, tu crois que j’en guérirais un jour ? Ou je suis condamné à devoir te supporter pour le restant de ma vie ? »
Du bout du nez, j’en profite pour chatouiller un peu sa nuque découverte.
« —
Tu nous imagine, vieux et ridés, dans une grande maison…avec une vue sur un lac au moins aussi scintillant que celui qui borde le parc de Poudlard... Avec un chien, pourquoi pas… On s’embrouillerai pour un rien, tu me reprendrais en m’obligeant à ranger mes fringues proprement et tu me dirais de ne pas laisser trainer mes affaires à tout va. Chizu-chan passerait son temps à faire irruption par la cheminée sans y être invitée, tu grincerais des dents mais tu finirais toujours pas lui pardonner son côté enflammé. »
Je dandine un peu l’échine pour me coller davantage à mon homme, et sa chaleur corporelle suffit à m’apaiser et à me faire oublier la dure morsure de la réalité qui nous berce d’ordinaire.
« —
Je crois vraiment qu’on pourrait être heureux, comme ça. »
Mais j’ai assez donné dans le mélo pour aujourd’hui, alors je prends sur moi et je fais un effort pour me changer les idées et pour tourner le dos à la morosité qui ne me quitte pas depuis la fameuse soirée du bal.
« —
Bon aller ! Il est temps pour nous de nous remuer, sinon je vais vraiment finir par congeler sur place. »
Je ris un peu en me défaisant de l’étreinte rassurante de Lancelot. Je gesticule un peu pour me remettre sur mes jambes, et fais un geste pour aider mon homme à rassembler ses affaires. Puis je m’éloigne récupérer mon éclair de feu que j’ai abandonné plus loin, pendant que Lancelot récupère son sac.
« —
On fais quoi ? On décale dans ta chambre à la résidence ? »
Je lui jette un regard avant d’aller chercher ses doigts des miens pour l’obliger à me suivre. Nous descendons gentiment les escaliers et quittons les gradins à notre rythme, ni trop lent ni trop rapide. La brise vient flatter mes joues que je sens réagir et rosir instantanément. Je ravale un frisson et j'attend d’avoir les pieds dans l’herbe fraiche du stade pour choper le bras libre de Lancelot et pour le passer autour de mon cou pour me protéger. Nous passons devant la rangée d’arbre qui borde les gradins au moment de quitter le terrain, je ne peux m’empêcher de passer ma main – qui ne tient pas mon balai – autour de la taille de Lance pour aller lui pincer la peau juste sous les côtes.
« —
Dit-donc, ça m’en rappelle des souvenirs, cet endroit ! »
Je m’exclame en esquissant un geste du menton pour désigner l’arbre contre lequel Lancelot m’avait serré quelques années plus tôt. Quand il avait ressenti une furieuse envie de me foutre une baigne, et qu’il avait préféré s’en prendre au tronc d’arbre plutôt qu’à mon magnifique facies. Je ne peux pas m’empêcher de lui faire la remarque :
« —
Avoue que c’est mon magnifique facies, qui t’a retenu à m’en foutre une, ce jour-là. »
Je relève le nez pour le regarder dans les yeux, tout sourire.
« —
J’ai toujours su que tu avais un faible pour les « asiatique aux yeux bleus et musclés », c’était pas ça ? »
Je pars dans un fou-rire qui finit par aviver un point de côté dans mes reins, mais ça ne m’empêche pas de continuer de me fendre la poire. J’en ai les larmes qui me montent aux yeux.
« —
pfft…le bon vieux temps…j’vous jure ! »
J'attend de me calmer un peu et de voir la réaction de Lancelot avant de poursuivre tout en reprenant mon sérieux. J'en profite pour me placer devant lui pour l'empêcher d'avancer plus loin et pour accaparer pleinement son attention.
« —
Je t'aime tellement, Lancelot Darren Avery, qu'une vie ne suffirait pas pour te l'exprimer entièrement... »
Un large sourire vient étirer mes lèvres, pas peu fier de mon petit effet. Et si ça pouvait le faire rougir, ce serait encore mieux !
@Lancelot D. Avery